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Vendredi (18/11/11)
Des endroits et des odeurs

L'odeur est une des perceptions les plus difficiles à fixer dans le temps. On peine à se remémorer des effluves, on ne peut pas vraiment faire réapparaître le souvenir d'un parfum, sans l'avoir sous le nez on n'en garde qu'une idée très vague. On peut savoir la senteur que portait quelque chose, sans pour autant être capable de la sentir par la pensée.

L'odeur est une des perceptions les plus difficiles à fixer dans le temps, et pourtant elle est souvent la seule chose qui s'attarde d'une personne qui s'absente, la seule trace fugitive mais concrète que son passage laisse derrière elle. L'odeur qui se dépose sur les vêtements, imprègne les draps, s'accroche à l'épiderme. Le paraphe de la peau, le testament de l'étreinte.

Je crois que c'est son odeur qui m'a le plus convaincue, c'est la première chose que j'ai remarquée d'elle, et sans doute celle qui me laisse le plus nostalgique. Parce que mon souvenir le plus fort de cette soirée-là, c'est son parfum, blotti entre mes bras dans le creux de la nuit et attaché à l'oreiller au petit matin.

J'ai beau manquer de nez, je suis pourtant étrangement sensible aux odeurs, et ce n'était pas la première fois que l'une d'elles m'attiraient contre un autre corps. D'ailleurs, dans le fait de fumer une cigarette, il me semble que ce que j'aime le plus, c'est l'arôme qui s'enroule et se fixe au bout de doigts.

Mais la dernière fois, j'ai eu beau le chercher dans la nuit, elle n'avait pas mis son parfum.


Je ne sais plus très bien si c'est moi qui ai adopté Montréal ou Montréal qui m'a adoptée. Probablement un peu ou beaucoup des deux. En tout cas je me sens à la maison ici. Dans les rues, les parcs, les salles de cours même, les bars, la bibliothèque. Dans la maison, dans ma chambre, avec mes douze colocs. Je me sens à la maison partout et en tout, et je ne me suis jamais sentie aussi chez moi dans ma vie.

Même si c'est fou de penser qu'il y a tout juste trois mois j'étais encore en France et qu'il y a six mois je sillonnais les voies ferrées de l'Europe avec mon sac à dos. J'ai dû regarder le calendrier plusieurs fois pour me persuader que je ne me trompais pas dans mes calculs. Ça fait déjà si longtemps? Six mois, c'est la moitié d'une année, six mois, c'est comme une éternité, et j'ai autant l'impression que c'était hier, que l'impression qu'une vie entière est passée depuis. Trois mois, c'est déjà presque la fin de la première session, et même sans l'appréhension des examens, j'ai du mal à y croire.

Peu importe, il suffira de célébrer ce soir.

Ecrit par Plog, à 18:41 dans la rubrique I'm Not There.
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Mercredi (23/02/11)
La nuit qui file sous les talons
--> Freedam

"Sitting there, alone in a foreign country, far from my job and everyone I know, a feeling came over me. It was like remembering something I'd never known before or had always been waiting for, but I didn't know what. Maybe it was something I'd forgotten or something I've been missing all my life. All I can say is that I felt, at the same time, joy and sadness. But not too much sadness, because I felt alive. Yes, alive. That was the moment I fell in love with Paris. And I felt Paris fall in love with me."

Une jolie journée s'éteignait doucement sur les canaux, les lumières des coffee shops et autres vitrines ponctuant la nuit naissante d'une kyrielle de tâches colorées. Les ténèbres étaient tièdes, les rues clairsemées, et le cœur à la joie. Je baladais nonchalamment ma solitude, dessinant sur mes pensées une histoire à écrire et accrochant le paysage mouvant à mes pupilles. Puis tout à coup, comme ça, je me suis dit et si. Et si, par exemple, je me mettais à courir, là, maintenant, tout de suite. En pleine rue, sans raison, peu importe les gens. Et si, je trouvais le courage d'agiter mes pieds et de lancer mon corps dans la vitesse, d'accélérer le tableau. Pour le délice de la liberté de le faire. Pas parce que j'aime courir, pas parce que j'en avais envie, je suis du genre à m'étouffer en quelques foulées. Pas pour ça donc, mais pour l'impulsion de l'acte gratuit. Juste pour l'acte gratuit.

Ça n'a pas été facile, mes semelles collées au bitume par le regard des autres et la conscience de la lourdeur de mes gestes, ça n'a pas été facile, mais j'ai fini par me convaincre. Mes pas avaient beau hésiter, intimidés, peu à peu ils s'étiraient, s'élançaient. Jusqu'à bientôt dévaler au hasard les ruelles tranquilles et les quais sans parapet, sur la bordure étroite rognée par les voitures, vélos et lampadaires, au-dessus de l'eau assombrie. Le sourire avait grimpé à mes lèvres et n'en démordait pas, tandis que le sentiment intense d'être en vie se répandait dans le moindre de mes pores, accompagné d'une bouffée grisante de liberté.

Je ne me suis arrêtée que lorsque mes poumons se sont trouvés au seuil de l'implosion, et je me suis assise sur le rebord d'un canal, les jambes ballantes. Lorsque je me suis remise debout, pour la première fois depuis que j'étais à Amsterdam, j'ai pensé à lever le nez vers les étoiles. Et j'ai décidé de ne pas aller me coucher avant d'avoir trouvé la Grande Ourse, qui échappait avec acharnement à mon regard. A la place, j'ai rencontré un réfugié ouzbek qui se promenait à vélo et avait pour hobby de dénicher les objets éparpillés dans les rues. J'ai fini par repérer la grande casserole quelques minutes après lui avoir dit au revoir.

La liberté la plus vive, c'est celle qui s'impose comme sa propre fin, sans autre motif que celui de ne pas en avoir.


Ecrit par Plog, à 13:12 dans la rubrique I'm Not There.
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Lundi (17/01/11)
2010 is dead, long live 2011
La neige formait un tapis si épais que les roues des voitures s'y empêtraient. Alors il a fallu finir à pieds, grimper la colline avec l'énorme sac et toute la pluie-neige qui s'abattait encore. On est arrivé trempé et soulagé de l'être (arrivé, pas trempé), mais en fait, cette expédition, ça me faisait sourire à l'intérieur. Et puis il y a eu cette semaine coupée du monde, retranchés dans ce centre perdu dans la forêt, cette semaine complètement différente, où on riait tellement qu'on avait l'impression de très bien se connaître et pas du tout d'être en formation.

Le retour à la réalité était étrange, à une poignée d'heures seulement de Noël, au milieu des morceaux de famille qui se rassemblaient et des flocons qui fondaient. Caillou (le plus p'tit des grands frères) a passé le réveillon à m'appeler Morticia et se foutre de ma tronche en manque de sommeil. Et ça me faisait juste sourire, toutes les vannes des grands frères, parce que c'était bien d'être ensemble, d'être un peu comme avant. Plus tard, Caillou nous a fait écouter Bang Bang , pour une raison floue, mais c'était touchant, quand il nous a parlé avec une gravité soudaine de la beauté de la chanson et de son envie de pleurer en l'écoutant dans son appart.

Tout comme c'était touchant de découvrir la tendresse de Nours (le moyen des grands frères) envers la fille de sa copine. Parce que Nours, c'est un type cynique qui se veut très sombre, toujours à vouloir jeter les bébés par les fenêtres et achever les grands-mères, à jouer son rôle de grand indifférent bourru. Mais avec elle, pareil qu'avec moi quand je faisais mes trois pommes, il est adorable. D'autant plus qu'il nous a annoncé qu'il allait être papa, et on sait tous qu'il en sera un bon.

Le 25 au soir, c'était une autre histoire, ma fausse grand-mère m'a à peine reconnue, ma cousine faisait mal à voir avec sa saloperie de maladie, toute décharnée et tremblante, et même le saucisson n'était pas bon (et ça, faut le faire quand même). Mais on est descendu à six pour "promener le chien" (parce que ça fait mieux devant les parents que de dire qu'on va griller des clopes et partager un joint de Noël, bizarrement) et il y avait du vin, alors on a survécu.

Le 31, on a mélangé les heures et les langues pour trinquer, parce qu'il fallait honorer l'Indien, le Roumain, les Français et la flopée de Grand-Bretons présents (j'en oublie sûrement). Avec ces décomptes à répétition, on n'a pas dû la louper quand elle est passée, cette nouvelle année. Moi j'ai passé le repas à une table sans fin (dont la moitié s'est écroulée au beau milieu du dîner), tassée entre Rob' et une lesbienne moqueuse qui m'accusait d'avoir une double vie (à cause de Leisha Hailey, Dana Fairbanks et la bague à mon pouce). Un sujet qui est d'ailleurs revenu plus que jamais ce soir-là, allez savoir pourquoi.
On s'est plié à la bataille de cotillons mais on a diversifié un peu en embusquant Rob' pour l'enrouler dans du PQ (mission échouée), parce que j'avais réussi à faire une tortue (et un ouistiti) en fil de fer.
Vers trois heures du matin, Fish a disparu, on s'est lancé dans la ville à sa recherche, mais trop de nouvelles années s'étaient enchaînées dans la soirée pour que j'arrive à prendre l'histoire au sérieux. J'étais avec un Roumain schizophrène à gueuler le nom de Fish dans les rues, à partir dans des fous rires en causant loup-garous, à s'amuser à dévaler et remonter une pente en courant et à sauter dans les tas de restes de neige (et à aborder un inconnu qui rentrait chez lui pour débusquer un numéro de taxi). D'autres ont fini par retrouver Fish échouée sur les quais (ironique) et on est tous rentré attaquer la vodka, les chocolats et le poker (tous, sauf Rob' qui faisait la gueule parce que j'avais atterri dans les bras du Roumain, et Fish qui s'était écroulée).
J'y suis d'ailleurs restée jusque très tard le matin (dans les bras du Roumain). C'est le genre de types qui n'aime pas parler de son passé ou de sa famille (pas pour jouer les mystérieux, jusque parce que c'est sérieusement fucked up), pourtant il m'a raconté (presque) toute sa vie. Et il m'a même chanté une berceuse Roumaine pour m'aider à dormir (ça aussi, c'était touchant). Tout ça, et un peu plus, pendant que les autres ronflaient, entassés dans une pièce minuscule.
Levée à peine une ou deux heures après avoir fermé les yeux, quand toute la maison dormait encore, j'ai passé le reste de la matinée à effacer le chaos qui avait envahi les lieux, avec le père de l'amie qui recevait et une Grande-Bretonne. Ça occupe.
Quelques heures plus tard, après une suite compliquée d'événements, on s'est installé, Fish, le Roumain, deux boîtes de pop-corn et moi, au cinéma, devant Megamind, à célébrer la nouvelle année en se tordant de rire (avant de finir chez le Roumain).
Ça faisait longtemps que je me promettais de plutôt réussir un réveillon.
Ecrit par Plog, à 18:16 dans la rubrique I'm Not There.
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Mardi (23/11/10)
Collision
--> Ou comment j'ai (re)découvert Aragon


Y a des jours comme ça, où on retrouve un bout de verre dans sa peau.
Alors, même si le temps de se recroqueviller est passé, ça ramène quand même à la surface des morceaux épars comme les débris d'une vitre.

Un accident, un vrai , c'est pas comme dans les films.
Non, c'est ni cet énorme fracas de tôle froissée, de crissements de pneus et d'explosions en chaîne, à la percussion instantanée, ni non plus cette collision au ralenti où l'on voit chaque petite parcelle se heurter dans un silence tétanisant.
En fait, en vrai, c'est un foutu mélange des deux.
Ça arrive tellement vite et on y croit tellement pas qu'on n'a même pas le temps de s'en rendre compte. Un instant on est là, sur son vélo, à voir la voiture nous foncer dessus et à se dire que ça peut pas arriver pour de vrai. On a à peine le temps de penser ça, que c'est déjà l'instant d'après, celui où on est figé au beau milieu du rond-point, avec le sang qui dégouline sur son vélo et ses chaussures.
Du coup, y a rien, pas de bruit, et pas plus de souvenir. Néant, le trou noir, à la place de ces quelques secondes de notre existence. Et quelles secondes.

Il paraît que j'ai eu énormément de chance, parce que ça aurait pu être tellement pire. Pourtant, je me sens pas du tout chanceuse. Parce que j'aurais aussi pu ne pas me prendre de voiture. Et que c'est pas de la chance de l'avoir fait.

Mais ça aura au moins eu le mérite de me replonger un peu dans la poésie. Ces premiers soirs où j'étais seule avec la nuit et la colère qui grouillait dans mes veines, y avait que ça qui me calmait. Prendre au hasard un recueil de poèmes sur mon étagère, et lire la page où il s'ouvrait. Puis la suivante, et celle d'après. Ou d'avant. N'importe, juste lire.
Eluard, Apollinaire, Aragon... Surtout Aragon.
Au bout d'un moment, la fatigue supplante doucement le reste. Alors on marmonne comme une incantation, les mots qui se bousculent et les sens qui se heurtent, le poème se fond en une coulée apaisante et hypnotisante de sons qui se font écho.
Ecrit par Plog, à 21:28 dans la rubrique I'm Not There.
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Mardi (31/08/10)
Ma faute à toi ♪
--> Quelque chose s'est passé pour moi ce soir-là
Parce que depuis, cette fille me tangue dans le ventre.
Ça fait des papillons et des fourmis, tout un troupeau qui se noue en boule. Essaye de s'échapper, se heurte aux parois, et étouffe d'être là.
La soirée s'est enchaînée de rires en bières et de bières en rires, avec beaucoup de conneries, du champagne, de la peinture, un barbecue... Des jeux au milieu de la nuit et de la salle des maternelles.
Et puis, et puis, elle qui dansait, sa voix, son sourire. Tout en chamade dans ma tête. Alors que je ne la connais pas, ne la connaitrai jamais.
Ses clopes disparues, ses bribes de révélations alcoolisées. Ses remarques ambigües, alors qu'elle ne me voyait pas, pas là, pas comme ça.
Les fous rires à l'arrière de la voiture en trombe dans la ville, ses cris pour effrayer les cyclistes. Sa silhouette sur le trottoir sombre. Le tout dernier aperçu, sans le savoir.
Son image floue mais qui ne parvient pas à s'effacer, alors qu'elle n'a aucune raison d'être. Alors que je ne devrais même pas l'avoir remarquée.
(D'après grand-frère, elle et A. m'ont bien aimée, ça m'a fait mal de rire. S'ils savaient.)


Mais c'est même pas grave.


Parce qu'avec grand-frère, on a beau n'être au fond pas si proche, on se fabrique des instants précieux, à s'inventer une faune à pois, cure-dents, et mammouths en se promenant dans les bois, et à transcender la vieille ville par les traboules. -On croirait plonger dans un autre univers, qu'il a (presque) dit.-
(Mais il dit aussi beaucoup de conneries, grand-frère, il paraît qu'il aurait même dit que j'étais une fille bien)
Parce que j'ai marché pieds nus dans la montagne, vu le Mont-Blanc perchée à trente mètres de haut dans un arbre, nagé dans le lac jusqu'à ma bouée, fait la course à vélo avec un chien-loup, assisté à une boum agitée de cinquantenaires, échappé à une horde massive de lilliputiens portés sur les bisous.
Parce que j'ai vu défiler les champs, joué au Uno à la lueur d'une bougie, visité des plantes carnivores, initié Rob' au pseudo-camping, zieuté les étoile passagères en pleine campagne, goûté la culture locale -les jeux et les alcools.
Parce qu'il y a des fois où la vie est simple et les questions se mettent en pause. Parce que l'Allemagne c'est finalement pas si loin. Parce qu'avec Manchot, on fait le tour de la ville et du lac sans même avoir évoqué la direction à prendre, et puis qu'on improvise un combat de bambous dans la nuit, avant de partager un transat pour observer ce qui brille là-haut.
Parce que le mois d'août, même quand les vacances s'improvisaient en boulot, était un peu magique. Surtout à sauter de train en train, et même les doigts de pied dans les orties.

Et que c'est comme ça que s'était achevé Juillet:

J'ai regardé une dernière fois le centre alors qu'on s'éloignait en marche arrière, et j'ai pensé, c'est con comme c'est symbolique. De partir comme ça. Et puis j'ai pas eu le temps de l'amertume, parce qu'on grimpait les rues étroites avec l'autoradio à fond, les voix qui dansent, et le sourire incontrôlable. Qu'on s'est enfoncé dans la forêt et tous les souvenirs des dimanches de quand j'étais gosse par cette petite route. Et puis la campagne, les petits villages, si près pourtant de la banlieue. La maison-catalogue déco', sans un poil de fouillis ni de mauvais goût. Les récits de cette dernière journée, les blagues sur les gamins, le Ti Punch. Les bulles qui s'élèvent en douceur dans le cerveau, le magnétisme des capsules sur mon front, le reste flou et très joyeux. Le retour particulièrement animé dans la voiture dans la nuit, les détours par les petites rues pour éviter les contrôles de police, les débats vaseux à propos du Texas, de ses villes et de ses animaux sauvages.


Aussi, parce que ça balaie les miettes de sentiments que je ne m'efforçais déjà plus de rassembler. Et du coup, ça achève de réaliser le premier de la poignée de vœux que j'ai lancés aux étoiles filantes. Je sais ce que je veux, ou plutôt qui je ne veux pas. Ça m'aura pris un temps fou pour le comprendre. Encore maintenant, je doute en relisant des lignes fanées à propos du creux de son odeur et de ses bras.

(C'est bizarre d'être de retour -là où les seuls reliefs sont gris et bétonnés. Et c'est encore plus bizarre, la jolie page toute blanche devant moi -ceci est une métaphore.)
Ecrit par Plog, à 22:59 dans la rubrique I'm Not There.
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Samedi (26/06/10)
When I see land, land, land ♪
Ça me rouille, ce sentiment d'insatisfaction parfaitement déplacé. Cette amertume frôlant souvent la déception, ce sale arrière-goût de malaise qui traîne dans le fond de la gorge.
Évidemment, j'aurais pas dû, focaliser toutes les attentes du retour comme ça. Évidemment, c'était très con de suspendre tellement d'espoirs à une paire de lèvres au bout de deux bras. Et là où l'ironie se marre bien, c'est que j'ai eu beaucoup plus que ce que j'osais imaginer. Juste pour me rendre compte que j'en voulais pas vraiment. La sincérité alcoolisée ne se trompait pas hier soir en niant les sentiments, même si la brume estompait suffisamment les contours des défauts pour prolonger l'illusion et m'emmener plus loin. Mais elle s'est dissipée avec le jour qui se levait. Même s'il y avait encore son bras autour de moi, constante de la nuit.
C'était stupide, mais ce serait rien, jamais rien que les fausses routes coutumières -avec un peu plus de (dé)mirage-, si le reste semblait plus stable sous mes pieds. C'est même pas que ça ne va pas, les gens conspirent pour me rendre le retour au pays remarquable, y parviennent, et les bons moments s'enchaînent. Ma vie ressemble de très près à ce qu'elle était avant que je parte, version plus mieux et rythme quasi-effréné. Et c'est bien là le problème, très logiquement, l'existence ici n'est pas bien différente de ce qu'elle était avant. Sauf que moi j'ai changé, d'une façon ou d'une autre, et j'ai l'impression de ne plus rentrer dans mon quotidien, de ne pas avoir la bonne forme pour m'insérer dans ma vie.
Évidemment, il me suffit de refaçonner le moule, adapter mes jours à mon nouvel aspect. Évidemment. Mais je ne sais pas bien ce que je suis devenue, et, malgré le ressenti d'étrangère à ma propre vie, je ne me suis pas non plus transformée en quelqu'un d'autre. Et puis j'essaye, de marquer une différence, ou un assemblage branlant de petites différences qui serait assez pour m'aider à renouveler mes repères dans mon univers. J'essaye, un peu. Malgré le désarroi invisible, planqué plaqué sous la surface.
Heureusement que mes moments improvisés avec ma grand-mère ont l'habitude confortable, heureusement qu'il y a eu les tasses de son café à la noisette à l'excès, l'attaque de colline à coups de roues de vélo, la musique plein les oreilles, l'alcool inconnu dérobé à un inconnu, les excursions en avant-première chez les lilliputiens, les retrouvailles avec les rues étroites de la banlieue et son train et puis la capitale, les sourires grappillés aux inconnus dans l'aéroport, l'omniprésence amicale et les sorties ininterrompues, Khalil Gibran au soleil sur le banc du jardin et la Stand Up Poetry enfouie sous mes couettes, les fêtes en pagaille, quelques attaques violentes de bonne humeur, le sellenapping au parfum de champagne que mon frère a fait subir à mon vélo, le soleil qui daigne se repointer, le reluquage d'étoiles sur fond de pelouse, les rires souvent fous, et tous ces instants précieux...
Mais du coup, ça me rouille, de ne pas parvenir à tout à fait me réjouir, malgré toutes les raisons que j'en récolte.
Ecrit par Plog, à 20:36 dans la rubrique I'm Not There.
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Lundi (31/05/10)
Nostalgie par secousses
Ce n'est pas un sentiment aussi persistant qu'on pourrait le croire. Forcément, il est quand même toujours un peu là en tapisserie dans le fond, mais assez souvent c'est pas grand chose. Il y a bien quelques vagues de manque des gens qui donnent l'impression d'un poing férocement broyeur à l'intérieur, heureusement. Mais il n'y a pas de constante très solide, peut-être parce que c'est trop loin, justement.
Non, la nostalgie est en saccades.
Il y a des souvenirs en petites bouffées, un geste un son une odeur une image un goût, un sens chatouillé, et c'est un moment un sourire une habitude une personne un endroit, un fragment de mémoire, un morceau de familier, qui revient. Il y a le mal du pays et des gens par fractions d'instants.
Douces-amères les fractions, une mélancolie qui tend du côté rêveur, et même approche un certain réconfort quand la perspective du départ s'impose de trop près pour parvenir a l'esquiver. Ou vouloir?

(Un océan, une dizaine de jours, et un paquet de kilomètres, entre moi et la France.)
Ecrit par Plog, à 04:43 dans la rubrique I'm Not There.
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Vendredi (09/04/10)
Les genoux bleus
--> (I always ignore the pain, until it's too loud to be contained with the other whispers in my head)

Comme si les choses l'atteignaient directement sous l'écorce, mais sans faire de bruit, sans qu'elle en soit même consciente.

Comme si elle se prenait des coups, ne les voyait pas passer, mais en gardait des traces.

Comme si la douleur s'instillait à pas feutrés en elle, étouffant l'onde de choc, ne laissant que les empreintes de son passage, à découvrir et subir plus tard.

Comme si elle se promenait si négligemment détachée de ce qui l'entourait qu'elle ne se rendait même pas compte qu'elle se heurtait aux cloisons de cet univers.


Mais elle continuait à appuyer sur la peau bleuie, pour voir. Pour voir si ça faisait mal...

Ecrit par Plog, à 02:23 dans la rubrique I'm Not There.
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